Freedom
Quatrième de couverture :
Patty Berglund est-elle la femme idéale ? Pour Walter, son mari, la réponse ne fait aucun doute : c'est oui. Epouse aimante, mère parfaite, Patty a tout bon. Mais qu'en pense-t-elle ? En renonçant à Richard, ce "bad boy" dont elle était amoureuse - et qui se trouve être le meilleur ami de Walter - Patty a peut-être commis l'erreur de sa vie. Freedom raconte l’histoire de ce trio et capture le climat émotionnel, moral et politique des États-Unis entre entre 1970 et 2010 avec une incroyable virtuosité.
Anatomie d’un mariage et d'une famille - les Berglund -, ce livre analyse les illusions, les déceptions et les compromis d'un génération de baby-boomers qui avaient rêvé un jour de changer le monde. Mais c’est aussi un acte d’accusation implacable à l'égard d'une nation qui a cessé depuis longtemps d'incarner ses propres valeurs. Qu'avons-nous fait de notre liberté ? s demandent les personnages de Jonathan Franzen. Et quel monde laisserons-nous à nos enfants, qui nous ressemblent si peu ? Pendant ce temps, les États-Unis livrent en Afghanistan et en Irak leurs propres guerres napoléoniennes, tentant d’imposer cette même liberté par la force.
J'ai l'impression qu'il y a longtemps que je n'ai lu un roman aussi énorme, aussi ambitieux, aussi intelligent que Freedom. Et je ne sais trop par où commencer pour en parler. Je pense dire en vrac ce que j'ai aimé, malgré quelques longueurs certaines dans la fin de la troisième partie (ou l'impatience de le terminer pour lire d'autres titres attirants et différents de cette rentrée ?)
J'aime les romans "construits" : dans celui-ci, l'introduction nous esquisse déjà toute l'histoire de cette famille, on sait où on va (mais pas par quels chemins et péripéties, ni comment cela se terminera) et la conclusion fera pendant à cette première partie. La deuxième et la quatrième partie, "Des erreurs furent commises", journal intime, regard de Patty sur sa propre histoire, écrit à la demande de son psychiatre, encadrent la partie centrale "2004". Des événements à peine entrevus sont ensuite détaillés, sous le point de vue des différents personnages, les retours en arrière ou sauts dans le temps sont nombreux et rendent la lecture à la fois complexe et savoureuse. C'est extraordinaire comme l'auteur sait se glisser dans la peau de l'un et de l'autre, de Patty, ex-battante basketteuse, déprimée en permanence, de Walter, le gentil aux rêves qui se compromettent entre écologie trompeuse et gros sous, de Richard, le chanteur décalé pas si tordu que cela, de Joey, le fils qui s'est construit en opposition à son père. Les personnages secondaires tels que Connie et Lalitha ne sont pas en reste. Quels portraits psychologiques complexes, fouillés, quelle maîtrise dans la conduite de ses personnages !!
Ce qui m'a laissée bouche bée aussi (parce que je n'ai pas toujours tout capté des enjeux financiers), ce sont toutes les compromissions, les magouilles, les jeux du pouvoir et de l'argent au niveau national et international (et aussi les jeux du sexe à l'intérieur de la famille) : pouvoir qui fascine chacun à son niveau et l'amène à entretenir une image, à se construire d'une certaine façon, à s'ignorer parfois de façon morbide.
Mais en fait, la toile de fond de l'Amérique des années George W. Bush n'est là que pour faire ressortir ces différents caractères, ces différents membres de la famille Berglund, les choix de vie qu'ils font et dont ils cherchent longtemps à se libérer (ou pas - la force de l'inconscient...) Et c'est évidemment le portrait de Patty qui ressort de cette peinture...
J'ai adoré le piquant de l'analyse, dont je ne vous livre que deux petits exemples :
En parlant de Richard : "Le vaillant petit ego de Lucy, flottant sur l'océan d'insécurité de la maturité féminine, lui faisait pitié." (p. 253)
"Vin Haven savait vraiment parler aux gens simples (comme le prouvait son amitié avec George W.)" (p. 390 - celle-là m'a beaucoup fait rire)
Des personnages emprisonnés dans leurs rêves de bonheur, dans leurs désirs, dans leur façade, dans leur famille... au milieu d'un pays qui veut toujours donner des leçons au monde - et de quelle façon ! (j'ai un peu comparé avec Les Chutes de Joyce Carol Oates) : un livre assez passionnant, dont j'ai quand même du mal à avoir une vue d'ensemble, avec assez de recul.
Jonathan FRANZEN, Freedom, Editions de l'Olivier, 2011
Un grand merci aux éditions de L'Olivier et à Rémi Gonseau, de Price Minister, de m'avoir permis de lire Fredom dans le cadre des Matches de la Rentrée littéraire.
Un livre lu dans le cadre des challenges Rentrée littéraire 2011 et Littérature américaine
EDIT du 2 janvier 2012 : ce livre participe également au challenge 50 états, 50 billets pour le Minnesota.